Les consommateurs et le bien-être animal
La progression constante de produits se prévalant d‘une valeur ajoutée « éthique » (produits écologiques, produits issus du commerce équitable, produits issus de l‘agriculture biologique ...) témoigne d‘une attention grandissante des consommateurs envers les conséquences - directes ou indirectes - de leurs actes d‘achat. Plusieurs indicateurs montrent que la préoccupation croissante pour le bien-être animal s‘inscrit dans cette « demande sociale » (1) et dans cette exigence de modes de production plus respectueux et plus justes.
La consommation responsable permet aux citoyens d‘affirmer par leurs actes d‘achat une exigence vis-à -vis de ce qu‘il en coûte parfois à ceux – animaux ou humains – qui se trouvent impliqués dans la fabrication d‘un produit. En effet, en plus de présenter un caractère d‘équité envers les producteurs qui l‘ont élaboré, un produit d‘origine animale peut aussi être plus ou moins « équitable » envers les animaux utilisés pour sa fabrication.
S‘ajoutant à la vulgarisation des connaissances nouvelles sur la richesse des capacités mentales des animaux, les fréquentes crises sanitaires qui touchent l‘industrie agro-alimentaire modifient aussi le regard que nous portons sur les animaux de ferme. En ouvrant des fenêtres inattendues sur le monde de l‘élevage, elles amènent les consommateurs à découvrir l‘envers d‘un décor qu‘ils tendent souvent – avec l‘aide du marketing des filières – à idéaliser. Les études (2) montrent en effet que, dès lors qu‘elles sont connues du public, les conditions ordinaires d‘élevage des animaux suscitent une forte réprobation sociale. Les sondages d'opinion relatifs à la perception par le public du bien-être animal et des conditions d'élevage font état de critiques particulièrement sévères à l‘égard des pratiques inhérentes à l'élevage industriel, dont la claustration, la contention et les mutilations.
Bien-être animal et opinion publique : quelques indicateurs
Une enquête menée en 1997 par le laboratoire Corela de l‘INRA révélait que 95% des français considéraient qu‘il est nécessaire de prendre en compte le bien-être des animaux dans les pratiques d‘élevage. Selon un sondage réalisé par l‘institut Louis Harris pour le magazine 60 millions de consommateurs en mars 2004, 78% des français déclaraient accorder de l‘importance au bien-être animal dans l‘exercice de l‘agriculture.
Par ailleurs, les français interrogés lors d‘une enquête financée par la Direction générale de l‘alimentation (DGAL) déclaraient à 95% que « en élevage intensif, les animaux n'ont pas assez d'espace » et à 80% que « les mutilations sont inadmissibles ». A la question : « à l‘avenir, seriez-vous tout à fait favorable…à interdire l‘élevage des poules pondeuses en cage et n‘autoriser que l‘élevage en plein air, sachant que cette mesure entraînerait une augmentation du prix des oeufs ? », 85% des français répondaient « oui ».
Les enseignements de ces sondages se voient corroborés par une vaste enquête Eurobaromètre portant sur les « Attitudes des consommateurs concernant le bien-être des animaux d‘élevage ». Conduite par le secteur Analyse de l‘opinion publique de la Commission européenne, l‘enquête a fait l‘objet de deux campagnes de sondages en 2005 et 2006, interrogeant 52 000 personnes dans l‘ensemble des pays membres de l‘Union :
Attitudes des consommateurs concernant le bien-être des animaux d‘élevage :
55% des européens jugent que l‘importance accordée au bien-être animal par la politique de leur pays est insuffisante (64% en France)
58% des européens considèrent que le bien-être des poulets de chair est mauvais, voire très mauvais
41% des européens jugent que les poules pondeuses sont les animaux dont le bien-être est à améliorer en priorité
52% des européens ne savent pas comment identifier les produits prenant en compte le bien-être animal
62% des européens se disent prêts à changer leurs habitudes d‘achats (magasins, budget, ..) pour accéder à des produits plus respectueux du bien-être animal.
L‘enquête Eurobaromètre indique également que 89% des personnes interrogées jugent nécessaire d‘imposer les mêmes conditions de bien-être animal aux produits importés qu‘aux denrées originaires de l‘Union. Néanmoins, plus de la moitié des personnes interrogées estiment qu‘elles ne disposent pas des connaissances suffisantes sur les conditions d‘élevage dans leur pays, ni des informations nécessaires pour distinguer les aliments produits suivant des normes de bien-être animal acceptables.
Les résultats des sondages établissent en outre que, contrairement à une idée répandue, les personnes les plus soucieuses du bien-être animal sont majoritairement celles qui connaissent le mieux le monde agricole.
Une large majorité des personnes interrogées dans le cadre de cet Eurobaromètre se prononce en faveur d‘un étiquetage ou d‘un logo spécifique indiquant les normes de bien-être animal appliquées lors de la production des aliments qu‘ils achètent.
Enfin, il est important de noter que le principe d‘une récompense financière accordée aux éleveurs au sein de l‘UE qui usent de pratiques plus respectueuses du bien-être animal bénéficie d‘un soutien général (plus de 70% des citoyens européens).